Zebda « Essence ordinaire »
(1998)
EN QUELQUES MOTS
Dans cet épisode, on va vous parler des toulousains de Zebda ! Zebda, c’est dix ans d’âge minimum, sept musiciens et trois albums. Après des années de galères, le groupe finit par sortir de l’anonymat en 1998 avec un album “Essence ordinaire” qui incarne parfaitement la nouvelle France “black blanc beurre”.
Sur fond de rock steady, de funk, reggae ou châabi, la musique de Zebda fait apparaître une autre variété : populaire et métissée.
Avec des titres comme « Oualalaradime », “Y’a pas d’arrangement”, “Je crois que ça va pas être possible” et bien évidemment “Tomber la chemise”, ces fils d’immigrés algériens vont finir par être diffusés dans tous les campings et les supermarchés de France tout en conservant leur colère, celle du militantisme.
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Retour en 1998
Voilà pour les 13 titres de Essence Ordinaire ! C’est le 3ème album de Zebda. Il sort le 10 septembre 1998 en CD, Cassette, vinyle sur le label Barclay, chez Universal.
1998, je vous le donne en mille c’est l’année de la victoire des Bleus en coupe de monde ! On passe aux 35h et on créé l’asso ATTAC chère aux altermondialistes. C’est aussi le succès de Titanic au box office et la première de la comédie musicale Notre-Dame de Paris.
Dans les bacs à la FNAC aux côtés de Zebda on découvre le premier album de Louise Attaque, “Fantaisie Militaire” d’Alain Bashung, “Suprême NTM” de NTM et bien sûr le formidable Manu avec “Panique Celtique” de Manau !
La story de Zebda
Manu : On va revenir maintenant sur la story de Zebda avec toi Olivia, qui est en fait une loongue histoire parce que oui, avant de tout cartonner avec “Essence ordinaire”, les mecs en bien quand même bien bien galéré…
Olivia : Tout commence en 1982 avec la création de l’association Vitécri à Toulouse.
Ce collectif souhaite aider les jeunes des quartiers en leur proposant de réaliser des projets, notamment des vidéos. En 85, Vitécri réalise le film “Salah, Malik : Beurs”… qui raconte les galères d’un groupe de rock. Au casting, on retrouve trois acteurs débutants : Magyd, Pascal et Joël qui forment à l’écran le groupe “Zebda Bird”. La magie opère et les trois décident de vraiment faire de la musique ensemble.
Manu : Et on peut même s’en écouter un petit extrait de “Oualdi” leur premier 45t. Et je suis super fier de vous le faire entendre parce qu’il est introuvable sur internet
insert – Oualdi
Issus des quartiers populaires des Minimes et des Izards, ils gardent le nom Zebda (qui veut dire beurre en arabe), retirent Bird et appellent leurs potes, Mustapha, Hakim et Vincent à se joindre à leur joyeux bordel.
On est en 1989, après deux ans d’existence et de tournée un peu partout dans des bars avec 50 personnes comme devant 3.000 personnes à St Etienne en 1ere partie de la Mano Negra, Zebda remporte le titre de « Découverte des découvertes » du Printemps de Bourges. C’est la rampe de lancement. Ils gagnent l’enregistrement de dix titres et une tournée d’une vingtaine de dates.
Les Toulousains intéressent les labels, et plus particulièrement Nord-Sud, une division de Barclay.
Manu : L’Arène des Rumeurs, leur premier album, sort donc en 92, 10 ans après les débuts de Vitécri ! C’est un disque chaleureux et engagé, à leur image qui contient notamment un titre
insert – Arabdub
S’en suit un nouveau marathon de concerts. Ils font des FNAC, des Virgin Megastore, la tournée promo vire au cauchemar ils ne sont pas payé et doivent se déplacer avec leur propres véhicules ! Après plus de 100 dates en France, en Suisse et en Italie. Ils sont rin-cés. Malgré leur débauche d’énergie, les salles restent désespérément vides, c’est un fiasco. L’Arène des rumeurs atteint à peine 8000 ex. vendus. Barclay leur fait comprendre que ça va être compliqué pour un nouvel album. Les ventes ne couvrent pas les avances de la maison de disque.
Il faut faire un tube absolument !
Manu : Et c’est qu’ils vont faire je parie avec “Le Bruit et l’Odeur”, avec leur 2ème album, qui sort en 1995… ?
Mmmhhh, pas tout à fait ! 🙂 On va d’abord s’écouter un petit extrait.
insert – Le Bruit et l’odeur
Le titre fait référence à une déclaration carrément raciste de Jacques Chirac (que vous aurez bien évidemment reconnu) en 91.
Zebda ne manquera pas de le rappeler dans une interview au journal Le Télégramme : « A chaque fois qu’un homme politique dire une énormité, nous serons là »
Les 7 toulousains dérangent et font parler. L’album est très médiatisé et confirme leur engagement politique. Ils ne sont pas là juste pour amuser. Le 1er mai 1995, Brahim Bouraam, un jeune Marocain, est jeté dans la Seine par un groupe de skinhead en marge d’un défilé FN. Zebda écrira le titre “Le Pont du Carrousel” en hommage à la victime.
Bref, ils sont de tous les combats et rappellent qu’activisme et grosse bamboul’ ne sont pas incompatibles.
On écoute Magyd à ce sujet, attablé dans sa cuisine :
insert – Magyd tubes
http://www.prodanafilms.fr/mobile/voir-reference.php?idRef=35
“Attention, moi les tubes, les trucs à succès je sais pas faire. J’ai besoin de dire : ‘qu’est ce qui se passe avec les blacks, qu’est ce qui se passe en Afrique du Sud, qu’est-ce qui se passe en Algérie. Donc dès que t’as le mot Algérie dans une chanson…”
Manu : Fin 1997, ils sortent d’ailleurs le disque Motivés, produit de manière totalement indépendante par le Tactikollectif et La Ligue Communiste révolutionnaire.
On y retrouve des chants révolutionnaires interprétés par différents groupes toulousains. Le disque se vend a plus de 50 000 exemplaires, sans télé ni grosse maison de disques. Zebda ne touche pas un sou, les bénéfices sont reversés à plusieurs associations.
Le collectif Motivé-e-s ira plus loin encore en politique et présentera même sa liste en mars 2001 aux élections municipales de la ville de Toulouse avec 3 membres de Zebda dans ses rangs.
Manu : Mais l’album décisif, le tournant dans leur carrière, ce sera le 3e, celui dont il est question aujourd’hui : Essence ordinaire qui sort le 25 août 98.
Le titre de l’album provient entre autres des suites du Mondial de foot de 98. La France qui s’enthousiasme et récupère le métissage de cette équipe blacks-blancs-beurs. Pour Zebda, tout cela est finalement très ordinaire et existait depuis bien longtemps. Ce métissage qui fait partie de « l’essence » même de ce qu’est l’identité de la France.
Zebda et l’équipe de Barclay mise d’abord sur “Je crois que ça va pas être possible” comme premier single. Il y est question d’exclusion et de la ségrégation vécue et subie au quotidien par les sept copains. Notamment lors d’une soirée privée donnée par leur label, Barclay, au Palace à Paris. Le vigile, qui ne les reconnaît pas, leur interdit l’entrée : « Je crois que ça va pas être possible ».
Sur le morceau, on y entend la voix de Dieudonné, quand il était encore humoriste, quand il était encore drôle.
Le titre rentre quelques semaines dans la programmation de Skyrock. Mais le public n’adhère pas. Pas assez festif peut-être, un peu plombant.
insert – Je crois que ça va pas être possible
Quelques semaines plus tard, les premières critiques tombent :
Télérama du 9 septembre 98 : « Rieurs er crieurs, les Toulousains de Zebda s’en reviennent pour une nouvelle farandole discographique. On les a traités de tous les noms ces pov’gars : groupe de rap, orchestre de raï, champions du ragga… Mais Zebda ne se revendique d’aucun courant, d’aucune école…. Les sans-papiers, le racisme ordinaire, les exclus, la montée de l’intolérance font certes partie de leurs préoccupations, et ils le clament haut et fort, mais ce disque n’est pas un tract politique, plutôt une comédie humaine et musicale. »
Et même Le Figaro, pas vraiment du même bord politique :n« Voilà de quoi danser en s’instruisant. (…) Excellents textes très inventifs et souvent poignants, rythmiques d’une efficacité magnifique, arrangements malins : un disque exemplaire et pas seulement pour ses qualités musicales… »
On va faire maintenant une petite pause. On se retrouve juste après une petite page de pub :
insert I – pub tomber la chemise
https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/publicite/pub1185317060/zebda-electrique
Quelques mois passent, nous voilà le 27 juin 99.Tomber la chemise, le titre auquel ils ne croyaient pas trop au point de ne pas le mettre sur l’album, devient LE tube de l’été : première place du hitparade devant Texas et Jamiroquai ; le titre est en rotation sur NRJ 8 fois par jour ; le clip (avec Jamel en guest) tourne en boucle sur M6 et sur MCM.
La France s’empare de cet hymne à la fête, aux copains, à la vie. On l’entend partout.
Ils jouent le jeu de la promo avec comme ligne rouge de ne jamais se compromettre sur TF1.
Hakim explique le phénomène dans le journal l’Humanité :
« Tomber la chemise a élargi notre public. C’est une chanson qui symbolise notre côté festif sans rien trahir. Cette aventure m’a ouvert les yeux sur le nouveau monde. Moi, pur produit de quartier, grâce à la musique, j’ai pu aller à la rencontre d’autres gens et aimer ce que nous faisons. Je crois que ce qui caractérise le mieux l’esprit de Zebda, c’est l’intégrité avec soi-même et avec les autres »
Au total, c’est plus d’un million de singles écoulés et un pays tout entier qui hurle et saute frénétiquement car « ce soir on peut vous dire qu’on n’a pas sommeil ! »
L’album, lui, dépasse, les 650 000 ventes.
Mais Zebda ne change pas. Ils restent dans leur quartier à Toulouse, enchaînent les tournées un peu partout. Ils ont bien conscience du rôle que les médias veulent leur donner dans le paysage musical français. Ils restent humbles et gardent la tête froide.
Du 19 au 26 septembre 98, en association avec les magasins Tati, ils organisent des concerts à 9,90 Francs (soit 1,50€ si t’as pas connu les francs. En même temps, dans ce cas, t’es sûr d’avoir l’âge d’écouter ce podcast ?). La tournée se terminera même à l’Olympia !
En 2000, Zebda est toujours en haut de l’affiche. Les sept copains remportent deux Victoires de la musique : celle du Meilleur groupe de l’année et de la Meilleure chanson pour Tomber la chemise.
Mais ce succès ultra rapide n’est pas qu’un cadeau pour les membres du groupe. Autant Mouss et Hakim le vivent de manière très heureuse et joyeuse. Autant Magyd Cherfi le vit plus douloureusement. Il l’expliquera en 2005
“Cette chanson, nous l’avons vécue comme un traumatisme. Ce succès, c’est comme si ce n’était pas le nôtre. Il y a des tubes assassins, qui vous stigmatisent. Cette chanson a tué toutes les autres et sonné la fin du groupe.”
Zebda a du mal à accorder ses engagements avec son succès dans les circuits de l’industrie du disque : « Parler de misère avec un compte bancaire soudain bien garni peut effectivement s’avérer délicat ». Malgré ces divergences naîtra en 2002 Utopie d’occase, un album moins festif concluant un cycle pour le groupe toulousain qui se sépare l’année suivante avant de se reformer en 2008.
Le making-of de "Essence ordinaire"
MANU / Et avec toi Greg, on va évidemment dans le sud-ouest pour parler de l’enregistrement de cet Essence Ordinaire, et c’est à Toulouse évidement que l’album commence à prendre forme.
Grégoire Sauvage: Oui on est en 1997, Zebda loue à l’époque un petit local dans la périphérie toulousaine. Le groupe a la pression car leur maison de disque, Polygram (Universal) voudrait les voir dépasser le simple succès d’estime et enfin composer du tube!!!! Le collectif se met donc au boulot avec pour matière première les textes de Magyd Cherfi. Magyd c’est lui qui écrit toutes les paroles de l’album, c’est quelqu’un qui a une plume géniale et qui d’ailleurs après Zebda s’est lancé avec succès dans une carrière littéraire. Il parle de son rôle de parolier dans une interview
INSERT — ITV MAGYD CHERFI
Manu/ Et donc c’est à partir des textes de Magyd Cherfi que les démos commencent à prendre forme…
Oui c’est ça, le groupe commence par faire tourner une boîte à rythme un peu sommaire tandis que les deux frères Mouss et Hakim s’emparent des textes de Magyd, change un mot par ci par là, tente des mélodies qui vont peu à peu construire l’architecture du morceau.
La question du choix de la tonalité fait souvent débat car les trois chanteurs n’évoluent pas du tout dans le même registre et il faut donc trouver un compromis.
Autre possibilité : Magyd Cherfi a déjà une idée de mélodie en tête. Dans ce cas, comme l’explique le guitariste Pascal Cabero dans son livre Tomber la Chemise, voix, guitares, basses, batterie (celle de Vincent Sauvage!!!) définissait une première ébauche du morceau. On ajoute ensuite des samples pour ornementer le morceau mais en veillant à ne pas trop en faire, le groupe a bien conscience qu’il faut éviter de commettre la même erreur que leurs précédents albums : surchargeant de musique là où il faut surtout mettre en valeur le sens des textes.
Pendant cette période, amplis et magnétos tournent 24 heures sur 24. Le groupe travaille alors d’arrache pied sur une trentaine de chansons.
Ils en retiennent finalement 15 qui vont piocher dans la funk, le hip-hop, le rock festif façon « Mano Negra » en passant par la musique traditionnelle maghrébine, un sacré métissage mais parfaitement cohérent comme sur « Oualalaradime » où l’accordéon, l’un des instruments fétiches du groupe, joue les premiers rôles
INSERT — OUALALARADIME
Manu / Et Bingo, la maison de disques valide les démos, reste maintenant à les enregistrer…
Pour réaliser l’album, Universal fait appel à un producteur et ingénieur du son américain que l’on connaît bien ici à Radio K7, il s’appelle Nick Sansano. Pourquoi on le connaît bien? Parce qu’on l’a déjà croisé dans nos épisodes sur 666.667 club de Noir Désir et sur l’école du micro d’argent d’IAM, un disque dont il a finalement été éjecté au dernier moment.
Avant cela il avait produit les deux précédents albums du groupe marseillais mais aussi le cultissime Goo de Sonic Youth sans compter son travail avec des pointures du Hip-hop américain, Public Enemy ou encore Ice Cube, du lourd, du très lourd.
Zebda voit donc débarquer ce sorcier new-yorkais, ils s’attendent à être un peu pris de haut, ils découvrent finalement un gars accessible, à l’écoute et surtout avec un bon coup de fourchette. Le courant passe bien et la pré production débute dans le Gers en décembre 1997 dans un gîte loué pour 3 semaines.
De suite, Nick Sansano demande au groupe de supprimer deux morceaux de la track list car le timing est trop serré. Pendant, un moment le groupe pense à « Tomber la chemise » jugé comme l’un des morceaux les plus faibles… La bonne blague quand on sait le tube que c’est devenu, bon heureusement ils ne font pas cette connerie et ce sont finalement le Pont du Carrousel et quand on a Tchi qui passent à la trappe.
L’enregistrement en studio débute début 1998 au studio du Manoir dans les Landes là encore loué pour 3 semaines. Il faut aller vite pour coucher les instrumentaux. On convient que les voix seront enregistrées plus tard à New York. Nick Sansano et son assistant Cyrille Tallandier enchaînent des journées de 20 heures pour finir dans les temps. Mais le groupe se montre appliqué et le travail fourni en amont paye : les délais sont tenus.
MANU / Reste le plus important Greg, l’enregistrement des voix
Sans faire offense à la musique de Zebda, elle est avant tout un véhicule pour le sens des textes. Nick Sansano sait qu’il s’agit d’une différence culturelle majeure avec son pays d’origine, en France, les paroles ont plus d’importance que la musique et le mix des voix est donc un moment crucial.
Nick Sansano explique dans une interview à l’ABCDR du son : (lu par Manu)
« Aux États-Unis, on construit un arrangement pop autour d’un triangle : voix, mouvement rythmique, et mouvement harmonique. En gros, c’est la voix, la batterie et la basse. Ce triangle est très important chez les anglophones, mais moins en France. Chez vous, c’est d’abord la voix, et ensuite les deux autres calques.
C’est vrai que chez Zebda, les textes font mouche, c’est drôle bien écrit, rythmé, ça chante l’amour des mots, le bonheur d’être à la fois Gaulois et sarrasin, ça fait entendre le son d’une banlieue qui pour une fois n’est pas parisienne, ça offre aussi une bonne tranche de rigolade aux dépens des racistes et des cons, On écoute tout de suite Je crois que ça va pas être possible avec en Guest star, Dieudonné à l’époque où il était encore drôle.
INSERT je crois que ça va pas être possible
L'univers visuel de Zebda
Manu : On vous a raconté l’histoire de Zebda, le making of de l’album “Essence Ordinaire” mais on ne vous a pas encore parlé de cette pochette très belle et mystérieuse. On retrouve écoute maintenant Fanny.
Fanny Giniès : J’ai envie de commencer cette chronique avec une petite devinette, tiens, j’ai jamais fait ça avant. J’ai envie de commencer en vous demandant si vous reconnaissez ce générique télé ?
INSERT — générique tv
(tous : réponse devinette)
Et maintenant vous vous demandez tous pourquoi je vous passe ça, je présume ?
Ça m’est venu en cherchant le nom de la personne qui a signé la pochette de Zebda, vous savez je vais toujours fouiller dans les crédits pour découvrir qui a fait quoi. Et là, mystère, pour Essence ordinaire, y’a écrit : Pochette deux points Colombo.
Et ben merci, j’ai eu beau pousser l’investigation et tenter quelques recherches, impossible de découvrir qui se cache derrière ce pseudo. Il va falloir vous contenter de ça. C’est Colombo qu’a fait la pochette de Zebda, et puis c’est tout.
Manu : Affirmatif ma chère Watson. Mais est-ce qu’avec ta loupe de détective t’a réussi à voir ce qu’il y a sur cette pochette ?
Yep, là il suffit d’un peu d’observation : c’est une jolie photo de rue en noir et blanc, avec un virage bleuté. On y voit une rue dans une ville non identifiée, y’a des vieilles voitures et un combi volkswagen, je dirais qu’on est dans les années 70 ou début 80. Au premier plan à gauche y’a 3 jeunes qui poussent l’arrière d’une voiture, juste à côté d’eux y’a 2 autres jeunes, c’est une bande d’ados d’origines variées. Ils portent des doudounes, des bonnets, ils sourient, c’est l’hiver. J’aime bien c’est le lien symbolique entre les voitures et le titre de l’album. La scène est joyeuse, empreinte de nostalgie. On se dit que ça pourrait être les mecs de Zebda quand ils étaient petits.
Le reste du design est assez sobre, le nom du groupe en haut à droite, le titre et la track list en bas. Les typos sont sobres, vous la regarderez, elle est belle cette pochette.
Manu : Et à l’intérieur du livret, y’a des super photos aussi !
Oui, à l’intérieur on retrouve comme souvent les paroles des chansons, sur fond bleu. Et dans les marges des portraits photo de chaque musicien en noir et blanc par un certain Jonathan Mannion. Au dos de la pochette y’a aussi des photos du groupe mais en couleur, signées Geoffrey Biddle.
Je reviens un instant sur Jonathan Mannion, parce que c’est pas n’importe qui le gars. Je dirais même que c’est là que l’enquête devient intéressante. C’est un photographe et réalisateur américain très très actif dans la scène hip hop et RnB mondiale. Ancien assistant de Richard Avedon, aka l’un des portraitistes les plus légendaires de la photo moderne, il s’est fait un nom dans le rap game le jour où il a décidé de photographier toutes les personnes les plus importantes du milieu. Ils sont tous passés devant son objectif : Jay Z, Dr. Dre, Aaliyah, Outkast, Nas, Run-D.M.C, Lauryn Hill, Eminem, Missy Elliott. Citez n’importe quel nom, il l’a eu. Et comme je l’ai découvert sur le site de l’abcdr du son, il ne s’est pas arrêté aux Etats-Unis :
« Quand je venais en France, je demandais toujours à shooter les meilleurs des meilleurs. Je venais de faire une super session avec NTM et tout le crew du 93. Je savais qu’il me fallait aussi Akhenaton, Shurik’N et les autres membres d’IAM si je voulais vraiment avoir tous les plus grands. Suite à un shooting avec Oxmo Puccino en 1997, j’ai entamé une longue relation avec le label, ce qui a permis de développer ma reconnaissance aux États-Unis tout en continuant à contribuer au marché français. C’était gratifiant pour moi d’être ici, d’avoir une valeur dans un autre pays, d’y photographier la crème de la crème. »
Et voilà comment on se retrouve à avoir ce mec qui produit des images pour Zebda.
Manu : Mortel l’anecdote, merci Fanny ! Est-ce que t’as trouvé des trucs cools sur les clips aussi ?
Ah oui, franchement quand j’ai maté le clip de Tomber la chemise j’ai pas été déçue.
INSERT – TOMBER LA CHEMISE
Le truc vraiment cool avec ce clip, déjà c’est l’esthétique assez pop, très amusante, y’a beaucoup d’humour, un peu comme chez Michel Gondry. Le scénar c’est que les mecs de Zebda incarnent des déménageurs, ils portent tous la même combi orange et bleu, on dirait des playmobils. Ils vont livrer d’énormes caisses en bois à différentes personnes dans une cité HML, dans des pavillons de banlieue. Entrecoupé de scènes où ils sont au volant de leur camion ou bien dansent avec les caisses dans un hangar. Allez voir c’est très rigolo.
Manu : Et parmi les gens à qui ils livrent ce bordel, y’a 2 ou 3 têtes connues…
Et oui, des stars montantes de la télé, qu’on affectionne tous (enfin sauf Greg parce qu’il est trop snob) : j’ai nommé Jamel Debbouze et Omar et Fred !!
Et comment ça se fait qu’ils sont là ? Et bien ils sont là parce que le réalisateur du clip n’est autre qu’un certain Denis Thybaud et qui a longtemps travaillé à Canal+. C’est lui qui réalisait l’émission Le Cinéma de Jamel sur Canal+ et qui a mis au point quelques années plus tard l’incontournable Servce Après Vente des émissions d’Omar & Fred. Gros gros kiff le SAV, j’aimais trop Tata Suzanne, Rocco et François le Français. Du coup, allez, petit plaisir perso en guise de conclusion
INSERT – Omar et Fred SAV
À PROPOS DE RADIO K7 PODCAST
Chaque mois dans Radio K7 on discute d’un album avec mes copains autour d’une table, parfois avec des invités comme Pénélope Bagieu ou Nicolas Berno. Il y a des chroniques et des débats, on s’interroge sur l’histoire du disque : comment il a été produit, ce qui a fait son succès, et puis finalement ce qu’on a envie d’en retenir 20 ou 30 ans plus tard.
Le 5 janvier 2020, Radio K7 est devenu le premier podcast indépendant sur la musique en France au classement Apple Podcast !
« On veut redécouvrir les 90s, apprendre des trucs et se marrer. »
Manu, Fanny, Olivia et Grégoire
“ Le but de ce podcast c’est de redécouvrir la bande-son des nineties. Parce que c’était celle de notre adolescence, qui a marqué toutes nos premières fois. C’était une période où la musique a commencé à prendre une grande place dans nos vies, avec les groupes qui ont forgé notre identité mais aussi nos plaisirs coupables. “